Médias : lettre au ministre de la culture

Le 20 juillet 2020

Monsieur le ministre,

La crise que nous traversons provoque des dégâts dans tous les champs de l’activité humaine, et elle n’est donc pas sans effets dans le monde des médias.

Au-delà de la vive inquiétude que nous réitérons au regard des différentes lois votées pour fracturer la liberté d’informer, nous souhaitons par la présente attirer votre attention sur quelques uns des enjeux cruciaux du moment face auxquels l’action vigoureuse de la puissance publique nous semble être requise. 

Tout d’abord, vous avez déjà été interpellé à plusieurs reprises par les parlementaires communistes, notamment par les voix de Marie-George Buffet et Pierre Dharréville, sur la situation de l’entreprise Presstalis, outil coopératif de distribution de la presse et donc de garantie du pluralisme et du droit à l’information. Les décisions du tribunal laissent le paysage dévasté et la liquidation des filiales assurant le niveau 2, mettant au chômage plus de cinq cents salariés, constitue un problème grave. La latence n’a que trop duré. Il faut s’assurer qu’un opérateur public puisse reprendre au moins temporairement l’activité pour assurer ce qui relève d’un impératif public avec les salariés qui sont disponibles pour cela et mettre en oeuvre une solution cohérente.

Nous soutenons la proposition d’une société coopérative d’intérêt collectif associant l’ensemble de la filière et la puissance publique. Nous vous demandons de prendre rapidement l’initiative et de répondre aux demandes pour que la presse puisse de nouveau être distribuée sur l’ensemble du territoire national.

Cette situation vient aggraver encore les difficultés de la presse écrite nationale et régionale, déjà aux prises avec des mutations importantes et soumises au conséquences d’une révolution numérique dominée par les GAFAM.

Nous devons assurer la sauvegarde de la presse écrite et lui permettre de trouver la voie du modèle de demain.

Nous devons assurer le pluralisme de l’information à l’heure où les dynamiques de concentration placent nombre d’organes de presse sous la coupe de puissances fionancières. Loin des conditions restrictives actuelles par lesquelles l’argent va à l’argent, des aides financières beaucoup plus adaptées et efficaces doivent être mises en place. 

Puisque la chose est à la mode, et même si ces initiatives ne nourrissent pas chez nous des illusions inconsidérées, pourquoi ne pas organiser un Valois de la presse écrite, qui ne soit pas un coup de communoication, afin de faire dialoguer l’ensemble des acteurs de la filière dans le but de renouveler les formes et les objets de leurs coopérations ?

Nous nous inquiétons également de l’avenir de l’audiovisuel public qui était déjà soumis à de vives tensions avant la crise.

Le gouvernement et la direction doivent renoncer au plan Veil, à Radio-France, avec ses 20 millions d’économies et ses 299 départs.

Concernant la réforme annoncée, nous avions la conviction que le projet de loi n’apportait pas les réponses aux questions posées, sur fond de compressions budgétaires à tous les étages. Les défis sont pourtant majeurs avec les transformations liées à la numérisation. Une part de la relance culturelle est liée à la capacité de l’audiovisuel public et aux objectifs qu’il poursuivra.

Dans ce monde de l’image, où nos imaginaires sont de plus en plus l’objet des convoitises pour les profits que cela peut générer, nous devons porter une ambition forte pour les service public de l’audiovisuel. 

Enfin, l’ensemble de ces enjeux vient rehausser pour nous l’exigence d’une politique publique du numérique attachée à la neutralité du net, au respect des libertés fondamentales et au refus des logiques de contrôle, de surveillance, de hameçonnage qui font du web un espace où la dérégulation totale en tous domaines est la règle. 

La transposition de la directive sur les Services de médias audiovisuels (SMA) ne doit pas se faire à l’avantage des GAFAM, opérateurs et télévisions privées. Les services de vidéo à la demande doivent sans conteste contribuer à bon niveau au financement de la création audiovisuelle et cinématographique dans les pays où ils font commerce, quel que soit leur pays d’établissement.

Enfin, nous sommes extrêmement vigilants sur le contrôle des contenus et le risque de censure. Là aussi, nous espérons une large concertation.

Voilà, monsieur le ministre, trois de nos sujets de préoccupation en matière de médias sur lesquels nous amerions connaître vos intentions.