La galaxie Bolloré : le règne des réactionnaires

Vincent Bolloré est dangereux. Il est dangereux sur tous les plans, politique, économique et social. Les derniers rebondissements à Canal Plus et sur CNews le montrent : on est à la fois dans le règne de l’arbitraire, une forme de culte de la personnalité, et plus grave encore, une intimidation institutionnalisée. 

Règne de l’arbitraire et intimidation, quand Sébastien Thoen, en novembre dernier, est viré sans préavis pour avoir osé une parodie de « l’heure des pros », l’émission de Pascal Praud. Idem, quelques jours plus tard, quand le journaliste sportif Stéphane Guy apporte un mot de soutien, en passant, à l’humoriste : il est « remercié » dans la foulée. Le 4 décembre, 150 journalistes signent une pétition de soutien. En mars de cette année, ils ont subi des pressions pour retirer leurs signatures. Le 5 janvier dernier, ils ont manifesté, masqués, parce qu’ils ont peur.

Ce sont des salariés. Comment peut-on laisser, dans un État de droit où le Code du Travail est un document si important, des pratiques pareilles perdurer ?

Culte de la personnalité, ensuite, et donc vrai problème politique : Vincent Bolloré a veillé à mettre aux manettes de ses chaînes des hommes-lige, devenus des emblèmes de la réaction : c’est Pascal Praud et sa cour de journalistes réactionnaires, comme Elisabeth Levy, qui peuvent balancer en toute impunité les pires horreurs racistes, sexistes ou homophobes. C’est Éric Zemmour, multirécidiviste de la sanction pénale pour racisme et/ou révisionnisme. C’est aussi Cyril Hanouna, dont le mot d’ordre est l’abrutissement, avec humiliation et sexisme en prime. Cela a été, aussi, le journaliste sportif Pierre Ménès, dont Canal Plus feint de découvrir les sorties hyper sexistes auprès de ses collègues femmes, comme l’a démontré le documentaire de la journaliste sportive Marie Portolano, « je ne suis pas une salope, je suis une journaliste ».

Il a fallu dix ans à Canal Plus pour réagir sur les baisers forcés en plateau à des collègues, et sous la pression médiatique.

Quand Marie Portolano a présenté son documentaire, la direction des sports a demandé à couper les séquences où Pierre Ménès trouve, en gros, qu’on ne peut plus rien dire et faire aux filles aujourd’hui. Misère : on cache la bêtise en espérant que ça passe. A l’heure des réseaux sociaux, c’est crétin. Mais Ménès reviendra surement par la fenêtre, comme il fait de l’audience. 

Enfin, Bolloré est problématique parce qu’il a la main mise sur une galaxie très importante : chaines de télévision de l’empire Canal Plus, le groupe de publicité Havas, les droits sportifs, le cinéma. Il vise aussi l’édition, avec la reprise du groupe Lagardère. Bolloré, c’est la réaction à la manœuvre. C’est en gros le monde tel que le rêvent les pires réactionnaires de ce pays, à la tête d’un empire faramineux. A un moment, il faudra bien l’arrêter. C’est une question de démocratie. 

Caroline Constant